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Il n'y eut jamais d'enfance ni de jeunesse plus abandonnées, plus attristées, plus monotones que celles d'Emily et de ses quatre soeurs. Pas une de ces petites aventures heureuses ou quelque peu inattendues qui, agrandies et embellies ensuite par les années, forment au fond de l'âme le seul trésor inépuisable de la mémoire souriante de la vie. Depuis le premier jour jusqu'au dernier, le lever, les soins du ménage, les leçons, le travail aux côtés d'une vieille tante, les repas, les promenades, la main dans la main, et presque toujours silencieuses, des graves petites filles sur la bruyère en fleurs ou couverte de neige. Au logis, l'indifférence absolue d'un père qu'on ne voyait presque jamais, qui prenait ses repas dans sa chambre, et ne descendait que le soir pour lire

On comprend alors qu'elle ne pleure pas comme la plupart des femmes qui errent toute leur vie de petites joies brisées en petites joies brisées. Une joie brisée n'accable que lorsqu'on la promène sans raison, comme le bûcheron qui ne déposerait jamais son fardeau de bois mort. Mais le bois mort n'est pas fait pour être promené sur nos épaules, il est fait pour être allumé et transformé en flammes éclatantes. À voir les flammes qui jaillissent dans l'âme d'Emily, on ne songe pas plus longtemps qu'elle n'y songe elle-même, aux tristesses du bois mort. Il n'y a pas de malheur sans horizon, il n'y a pas de tristesse sans remède, pour celui qui, tout en souffrant et tout en s'affligeant comme les autres, apprend

Peut-être manque-t-il un effort dans la vie d'Emily. Elle avait toutes les audaces, toutes les passions, toutes les indépendances dans son âme; mais dans sa vie, toutes les timidités, tous les silences, toutes les inactions, toutes les restrictions, toutes les abstentions et tous les préjugés qu'elle méprisait dans sa pensée. Trop souvent, c'est l'histoire des âmes trop pensives. Il est bien difficile de juger une existence en soi, et pour Emily Brontë notamment, il y aurait beaucoup

«Je n'aperçois pour toi, sur les grands genoux du destin, ni un signe d'amour, ni une étincelle de gloire, ni une heure souriantes'écrie, dans un beau mouvement de tristesse Miss Mary Robinson qui nous raconte cette existence. En effet, vue du dehors, il n'y a pas de vie plus morne, plus incolore, plus vaine, plus glacée que celle d'Emily Brontë.

Tout ce que nous cherchons par les chemins, amour, bonheur, beauté, aventures, ne se donnait-il pas rendez-vous dans le coeur d'Emily?