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Pendant que Michaud causait ainsi avec Laurent, en suivant lentement les quais, Mme Raquin avait une conversation toute semblable avec Thérèse. Au moment sa nièce, pâle et chancelante comme toujours, allait se retirer, la vieille mercière la retint un instant. Elle la questionna d'une voix tendre, elle la supplia d'être franche, de lui avouer les causes de cet ennui qui la pliait. Puis, comme elle n'obtenait que des réponses vagues, elle parla des vides du veuvage. Elle en vint peu

Dès lors, les réunions devinrent charmantes. A sept heures, Mme Raquin allumait le feu, mettait la lampe au milieu de la table, posait un jeu de dominos

Pendant trois jours, Mme Raquin et Thérèse étaient restées dans leur lit sans se parler, sans même se voir. La vieille mercière, assise sur son séant, appuyée contre des oreillers, regardait vaguement devant elle avec des yeux d'idiote. La mort de son fils lui avait donné un grand coup sur la tête, et elle était tombée comme assommée. Elle demeurait des heures entières tranquille et inerte, absorbée au fond du néant de son désespoir; puis des crises la prenaient parfois, elle pleurait, elle criait, elle délirait. Thérèse, dans la chambre voisine, semblait dormir; elle avait tourné la face contre la muraille et tiré la couverture sur ses yeux; elle s'allongeait ainsi, raide et muette, sans qu'un sanglot de son corps soulevât le drap qui la couvrait. On eût dit qu'elle cachait dans l'ombre de l'alcôve les pensées qui la tenaient rigide. Suzanne, qui gardait les deux femmes, allait mollement de l'une

Mme Raquin et Camille trouvèrent la course longue, la démarche hasardeuse; d'ailleurs, ils ne s'étonnèrent pas, ils laissèrent partir Thérèse en toute tranquillité. La jeune femme courut au Port aux Vins, glissant sur les pavés qui étaient gras, heurtant les passants, ayant hâte d'arriver. Des moiteurs lui montaient au visage; ses mains brûlaient. On aurait dit une femme soûle.

Ah! mon Dieu, disait-il d'une voix entrecoupée, ah! mon Dieu, l'épouvantable chose!... On sort de chez soi, et l'on meurt, comme ça, tout d'un coup... C'est horrible... Et cette pauvre Mme Raquin, cette mère, qu'allons-nous lui dire?... Certainement, vous avez bien fait de venir nous chercher... Nous allons avec vous...

Mme Raquin était une ancienne mercière de Vernon. Pendant près de vingt-cinq ans, elle avait vécu dans une petite boutique de cette ville. Quelques années après la mort de son mari, des lassitudes la prirent, elle vendit son fonds. Ses économies jointes au prix de cette vente mirent entre ses mains un capital de quarante mille francs qu'elle plaça et qui lui rapporta deux mille francs de rente.

Laurent se trompait, Mme Raquin était heureuse, heureuse des soins et de l'affection de ses chers enfants. Elle avait toujours rêvé de finir comme cela, lentement, au milieu des dévouements et des caresses. Certes, elle aurait voulu conserver la parole pour remercier ses amis qui l'aidaient

Un feu clair flambait dans la cheminée, jetant de larges clartés jaunes qui dansaient au plafond et sur les murs. La pièce était ainsi éclairée d'une lueur vive et vacillante; la lampe, posée sur une table, pâlissait au milieu de cette lueur. Mme Raquin avait voulu arranger coquettement la chambre qui se trouvait toute blanche et toute parfumée, comme pour servir de nid

Les enfants savaient depuis longtemps qu'ils devaient s'épouser un jour. Ils avaient grandi dans cette pensée qui leur était devenue ainsi familière et naturelle. On parlait de cette union, dans la famille, comme d'une chose nécessaire, fatale. Mme Raquin avait dit: « Nous attendrons que Thérèse ait vingt et un ans. » Et ils attendaient patiemment, sans fièvre, sans rougeur.

Et comme Mme Raquin sanglotait plus fort, ne pouvant arrêter ses larmes: Allons, allons, reprit Michaud, un peu de courage. Vous comprenez bien que nous venons ici pour vous distraire. Que diable! ne nous attristons pas, tâchons d'oublier.... Nous jouons