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Aurier manqua de quelques années pour s'harmoniser définitivement. Il en était encore

Enfin, Vieux est une oeuvre très imparfaite, mais non pas médiocre. Aurier annonçait plusieurs romans, les Manigances, la Bête qui meurt: comme toujours, et comme tous les faiseurs de projets, il se préoccupa de réaliser ses promesses dans l'ordre inverse il les avait faites.

Aurier avait, comme romancier, un don assez rare et sans lequel le meilleur roman n'est qu'un recueil de morceaux choisis: il savait ériger en vie un personnage, lui attribuer un caractère absolu et dévoiler logiquement, au cours d'un volume, les phases de ce caractère, non par de vagues analyses, mais par la mise en scène de faits systématiquement choisis pour leur valeur révélatrice: tel, dans Vieux, M. Godeau; tels, dans Ailleurs, Hans et l'ingénieur.

Il ne fallait guère moins de courage pour opposer, en 1886, au «brocanteur Meissonier» le «radieux Renoir», pour vanter Claude Monet «ce peintre dont l'oeil apprécie vertigineusement toutes les données d'un spectacle et en décompose spontanément les tons. M. Fénéon se prouvait, il y a plus, de dix ans, non seulement juge hardi de la peinture nouvelle, mais excellent écrivain. Il analyse ainsi les marines de Monet: «Ces mers, vues d'un regard qui y tombe perpendiculairement, couvrent tout le rectangle du cadre; mais le ciel, pour invisible, se devine: tout son changeant émoi se trahit en fugaces jeux de lumières sur l'eau. Nous sommes un peu loin de la vague de Backnysen, perfectionnée par Courbet, de la volute en tôle verte se crêtant de mousse blanche dans le banal drame de ses tourmentes.» M. Fénéon avait toutes les qualités d'un critique d'art: l'oeil, l'esprit analytique, le style qui fait voir ce que l'oeil a vu et comprendre ce que l'esprit a compris. Que n'a-t-il persévéré! Nous n'avons eu depuis l'ère nouvelle que deux critiques d'art, Aurier et Fénéon: l'un est mort, l'autre se tait. Quel dommage! car l'un ou l'autre aurait suffi

En critique, Aurier était encore d'avis que l'on doit examiner l'oeuvre en soi et qu'il est ridicule de faire intervenir dans sou jugement des motifs aussi vagues et aussi trompeurs que l'hérédité et le milieu. Il y a un lien de cause

Aurier serait allé très loin en ce genre, le roman de l'ironie comique, de l'amertume exhilarante: que de joies il nous eût données!

Poète, Aurier l'est encore jusqu'en sa critique d'art. Il interprète les oeuvres, il en rédige le commentaire, me esthète, peut-être, mais non pas esthéticien, et la valeur de sa critique, presque toujours positive, tient en partie au choix qu'il sut faire, de main sûre, entre les artistes et entre les oeuvres.

Cet ingénieur est une merveilleuse caricature: Aurier lui prête des propos d'un comique vraiment énorme et pourtant lamentablement vraisemblables, car c'est encore un autre de ses dons, comme romancier, de n'outrer jamais que le vrai ou le possible: il y avait en lui le génie d'un Daumier, et Daumier, seul, aurait pu conter avec des images un symbolique épisode aussi amèrement comique que la colère du Dr Cocon accusé d'héroïsme.